samedi 21 février 2015

Carne levare


Aujourd'hui -c'est de saison - j'aimerais vous parler du carnaval. En plus, c'est complètement raccord avec mon article précédent. Quel est le lien entre le carnaval et le végétarisme, me direz-vous... Et bien le lien est direct d'un point de vue éthymologique puisque carnaval viendrait (parmi d'autres hypothèses) du latin carne levare, enlever la viande.

En effet, le carnaval était le dernier moment où l'on pouvait manger gras et riche avant "d'entrer en carême", c'est-à-dire à  restreindre les calories, les sucreries, la quantité de viande que l'on mange ou même jeûner à l'origine.

Entrer en carême est une expression délicieusement désuète. Plus personne n'est au courant de ces 40 jours destinés à se purifier avant la résurrection du christ (Pâques donc) et franchement la plupart de ceux qui le savent n'y attachent pas grande importance.

Pourtant, cette histoire de Carnaval et de carême est vraiment intéressante. C'est en fait- comme Noël- une fête païenne que l'Eglise n'a pas réussi à éradiquer. Plutôt que de s'avouer vaincue, elle a décidé de l'entourer d'une série de règles et de symbolique pour l'intégrer dans ses rites. Bien joué l'artiste, ça dure depuis des centaines, des centaines et des centaines d'années.

A l'heure actuelle, la symbolique chrétienne n'est plus très pertinente mais l'origine païenne non plus! Pour que ces fêtes ne soient pas vides de sens - et avouons que c'est souvent le cas- il est extrêmement intéressant d'en redécouvrir la symbolique originelle.

Depuis des temps immémoriaux, la période qui va de janvier à mars est un moment où les hommes font table rase de l'année qui vient de s'écouler, où ils créent le chaos, bouleversent l'ordre établi afin de se préparer à l'arrivée du printemps et bâtir sur de nouvelles bases. 

A l'époque où on n'avait aucune idée des phénomènes qui régissaient l'univers, le cycle des saisons était extrêmement mystérieux.  Au cœur de l'hiver, il restait toujours un doute sur le retour du printemps. La succession des saisons dépendait du bon vouloir des dieux et on ne lésinait pas sur les sacrifices pour les encourager à  faire revenir le soleil de son long sommeil. On a conservé une trace de cette offrande au dieux dans les "bonhomme hiver" que l'on brûle à la fin des réjouissances.

La carnaval est également lié au bouleversement des hiérarchies sociales. Dans l'antiquité romaine, les esclaves se faisaient servir par leur maître; au moyen-âge, on donnait les attributs du pouvoir au benêt du village et  c'est un âne -symbole de satan apparemment- qui célébrait la messe.  

Durant ces jours où la pyramide sociale était renversée, le déguisement et le masque avait une signification profonde: ils permettaient de se libérer de son identité, de se désinhiber mais aussi d'oublier la souffrance et la misère du quotidien.

En cœur de cette fête devenue enfantine et stéréotypée, on retrouve donc une soupape sociale salutaire, l'envie de se débarrasser du mauvais, l'envie de se nettoyer pour créer du neuf en tout liberté.

Faire carnaval en ayant ses origines en tête, c'est se calquer sur le cycle des saisons et se fondre dans un  rite qui touche à notre nature primitive et profonde.

Cette année, une jeune artiste bruxelloise, Chloé Schuiten, organise un carnaval qui épouse parfaitement cette vision.  Hum... Âmes sensibles, s'abstenir



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